Souveraineté européenne

Le Pacte Vert au cœur des débats des élections européennes

À quelques jours des éléctions européennes, il apparait intéressant de faire un nouveau point d’étape sur la décarbonation de l’économie européenne et un état des lieux des avancées du Green deal européen. 3 questions à Juliette Cohen, Stratégiste chez CPRAM sur les ambitions climatiques Européennes.

Published on 30 mai 2024

Pacte vert

Juliette Cohen

Stratégiste - CPRAM

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Le Pacte vert européen sera un des sujets au cœur des élections.

Avant de comprendre pourquoi, pouvons nous faire un point d’étape sur la décarbonation de l’économie européenne.

Entre 1990 et 2021, l’UE a réduit de 31 % des émissions de gaz à effet de serre. Elle a donc atteint ses objectifs qui avaient été fixés à cette échéance. Cette baisse a pu être réalisée grâce aux changements dans les méthodes de production d’énergie, notamment la baisse significative de l’utilisation du charbon et à la progression des sources d’énergies renouvelables. A cela s’ajoute, une légère baisse de la consommation totale d’énergie et des diminutions substantielles des émissions de gaz à effet de serre liées aux processus de production industrielle.

La neutralité carbone pour 2050 est bien sûr toujours d’actualité et dans ce but, une étape intermédiaire a été ajoutée : réduire de 90 % ses émissions de GES à horizon 2040. Cette proposition est une base de discussion et la cible devra être adoptée par le prochain exécutif européen. 

Cette proposition implique que le cadre de 2030 (qui entretemps prévoit une baisse de 55% des GES) soit intégralement adopté et avec lui l’ensemble des législations prévues dans le cadre du Green Deal. Elle met aussi en avant la nécessité de préserver la compétitivité de l’industrie européenne et de réaliser une transition juste bénéficiant à chacun. Enfin, dans les scénarios permettant d’atteindre la cible, la commission fait état de besoins d’investissements massifs dans le secteur énergétique. 

Le Pacte Vert, lancé en 2019, est -il à l’arrêt ?  

Il n’est pas à l’arrêt mais plusieurs chefs d’État ont demandé une pause réglementaire. Pourquoi ? Il faut savoir que Le Pacte Vert a été lancé en 2019 pour accompagner la transition écologique de l’UE vers la neutralité carbone avec un cadre législatif lui permettant de bénéficier de financements importants. Il a été présenté comme la nouvelle stratégie de croissance de l’UE autour de quatre priorités : la transition écologique et numérique de l’industrie, l’économie circulaire, la protection de la biodiversité et les systèmes énergétiques.

Or, le problème de compétitivité de l’industrie européenne sur la scène internationale est devenu plus criant avec l’explosion des prix de l’énergie en 2022 et la concurrence internationale dans les secteurs liés à la transition climatique comme par exemple celui des véhicules électriques où la concurrence en provenance de Chine est sévère.

Par ailleurs, le déploiement des énergies renouvelables a été fortement freiné par un environnement économique moins favorable : hausse des coûts de financement, hausse des coûts de l’électricité, ralentissement de l’activité. Ensuite, le risque d’un mécontentement social croissant dans certains secteurs d’activité, agriculture par exemple, a également freiné les ambitions de réforme de la Commission européenne.

Enfin, la mobilisation des financements du plan de relance européen s’avère plus compliquée et plus longue que prévu : près de 4 ans après le lancement de Next Generation EU, 230 Mds € (données au 8 mai 2024) ont été versés aux États membres sur les 800 Mds € de la capacité de Relance et de résilience.

Où en est la politique industrielle européenne ? 

L’industrie européenne subit une conjoncture moins favorable depuis deux ans avec la hausse des coûts de l’énergie et des coûts de financements. Elle doit en plus faire face à des changements techniques structurels en lien avec la transition climatique : électrification, décarbonation ... A cela s’ajoute, une concurrence exacerbée pour les industries liées aux transitions climatiques et numériques notamment (photovoltaïque, semi-conducteurs, véhicules électriques, hydrogène…).

Malgré cela, la part de l’industrie dans le PIB de la zone euro (18% du PIB) a eu tendance à progresser un peu depuis 2021 après des années de baisse. L’Europe a prévu des financements européens pour accompagner ces transitions dans le plan de relance Next Generation EU mais on a vu qu’ils mettaient du temps à être utilisés. La notion d’autonomie stratégique a été mise en avant pour assurer la résilience des chaines de valeur, les approvisionnements dans certains secteurs jugés clés et des capacités de production dans l’Union européenne. Beaucoup de textes européens ont été adoptés en ce sens au cours des deux dernières années (Chips Act, Critical Raw Material Act, …). Le Net Zero Industry Act de 2023 prévoit d’assouplir certaines règles européennes comme par exemple celles sur les aides d’Etat. Le débat sur le financement des industries de défense est également lancé. 

Malgré une volonté politique forte, tous ces textes n’ont pas encore eu des effets aussi structurants que les plans comparables décidés en Chine ou aux États-Unis même si des annonces sont régulièrement faites sur le développement d’installations industrielles sur le sol européen ou des partenariats d’approvisionnement avec des pays tiers. Développer des écosystèmes industriels s’inscrit dans le temps longs, nécessite des moyens et une politique publique qui accompagne et donne de la visibilité dans la durée. Les prochaines années seront clés pour le développement d’industries d’avenir sur le sol européen. 

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