Défis environnementaux

L'océan, maillon essentiel mais fragile de la vie sur terre

Si c’est bien connu que l’eau a été indispensable à l’apparition de la vie sur terre, elle l’est tout autant à son maintien – dans de bonnes conditions. Pour le dire autrement : l’océan, qui forme 71 % de la surface de la planète et contient 97 % de l’eau présente sur la Terre, constitue un enjeu environnemental décisif. Du climat à l’habitat, de l’alimentation au transport, il joue un rôle central dans nombre de défis fondamentaux que devra relever la planète au cours des prochaines décennies.

Publié le 28 septembre 2022

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La 5ème édition du One Planet Summit qui s’est déroulée à Brest en février dernier avec le soutien des Nations-Unies a entièrement été consacrée à l’océan. Un choix fort qui n’a pas surpris les connaisseurs : alors même qu’il avait été décidé, en 2015, que le 14ème Objectif de Développement Durable (ODD) cible la préservation des « océans, mers et ressources marines », la prise de conscience n’a cessé depuis de progresser. Déterminées à faire de la protection de l’océan une priorité, les Nations-Unies ont ainsi déclaré les années 2021-2030 « décennie des sciences océaniques pour le développement durable ».

Il est vrai que les signaux alarmants se multiplient. Depuis le début de la révolution industrielle, la pollution des eaux a notamment multiplié par trois l’acidité des océans, un phénomène vital pour de nombreux écosystèmes marins. Plus visible : alors qu’entre 4,8 et 12,7 millions de tonnes de plastique terminent dans les océans chaque année, la fondation Ellen Macarthur estime que les océans pourraient contenir davantage de plastique que de poissons d’ici 20501… 94 % des oiseaux de mer du Nord auraient d’ores et déjà du plastique dans leur estomac2. Parallèlement, après une année 2021 record pour le réchauffement des océans3, la fonte des glaciers, du Groenland et de l’Antarctique, à laquelle s’ajoute la dilatation thermique de l’océan, conduit à une hausse constante du niveau des océans et de la mer.

L'océan, un organe vital pour la planète Terre

Or l’enjeu est proprement vital. Source de vie sur terre, l’océan est ainsi à l’origine de plus de la moitié de l’oxygène respiré par les humains. Plus encore que de la forêt amazonienne, nous sommes dépendants du phytoplancton – ces minuscules végétaux, invisibles à l’œil nu, qui se trouvent en suspension à la surface de l’eau4. Concrètement, celui-ci produit du dioxygène, dont une partie est rejetée dans l’eau pour aider les animaux marins à respirer, tandis que l’autre est directement libérée dans l’atmosphère. Problème : la capacité du plancton végétal à produire de l’oxygène dépend de la température de l’eau5… qui a déjà augmenté de 0,76°C par rapport au siècle dernier6. Résultat, l’océan a perdu 2 % de son oxygène au cours des cinquante dernières années7.

L’océan est également l’un de nos principaux alliés face au réchauffement climatique : il absorbe entre 20 et 30 % des émissions de COdues aux activités humaines, et même 90 % de la chaleur atmosphérique supplémentaire liée au gaz à effet de serre d’origine humaine. Parce qu’il est toujours plus chaud, acide et salé, l’océan perd de sa capacité à absorber du CO2, à l’image du puits de carbone de l’océan austral dont la capacité a été divisée par dix8. Une source d’inquiétude porte également sur la fonte des glaciers. Depuis 1956, ceux-ci auraient perdu plus de 25 gigatonnes de glace, dont la moitié au cours des 15 dernières années9. La surface de la banquise a, quant à elle, diminué de 96 % en 35 ans10. Or du fait de leur capacité à réfléchir les rayons du sol, les glaciers sont également garants de notre climat.  

Un rôle crucial de l'océan pour la vie humaine et économique

Les êtres humains sont eux-mêmes très directement concernés par ces périls. A l’heure actuelle, la moitié de l’humanité vit ainsi à moins de 100 kilomètres des côtes. Or le rapport du GIEC en date de septembre 201911 estime que l’océan pourrait s’élevait dans les décennies à venir d’1,10 à 2 mètres. Sans compter un autre phénomène lié au réchauffement climatique : l’augmentation prévisible de la fréquence et de l’intensité des événements météorologiques extrêmes, cyclones et tsunamis.

Autre sujet : la surpêche. En 2018, la consommation mondiale de poissons a atteint 20,5 kilos par personne, selon le rapport annuel de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) quand en 1960, les 3 milliards d’habitants de la planète consommaient en moyenne moins de 10 kg par an… La pêche intensive déséquilibre les écosystèmes et participe à la dégradation des fonds marins, tandis que l’épuisement des ressources pourrait également avoir des répercussions économiques majeures.

Pêche, aquaculture, tourisme côtier et marin, activités de recherche… À l’échelle mondiale, environ 350 millions d’emplois relèvent de l’économie bleue. L’OCDE12 évaluait en 2016 son poids à 1 500 milliards de dollars dans l’économie mondiale. Un chiffre promis à doubler d’ici 2030. Rappelons ainsi que 90 % du commerce mondial passe aujourd’hui par la mer, alors même qu’un navire émet 100 fois moins de GES qu’un avion – et que de premiers cargos à voile sont utilisés13. Envisagées plus largement, les ressources océaniques mondiales (pêche, transport, tourisme…) dépassent même les 24 000 milliards de dollars, générant une valeur annuelle de 2 500 milliards de dollars : 32 % en production indirecte (tourisme, activités côtières…), 29% en production directe (poissons, algues, récifs, fonds marins et sol marin, mangrove), 22 % transport maritime et 17 % pour l’impact écologique14.

Enfin, une dernière dimension clé condense plusieurs problématiques liées au sujet : l’océan est aussi une source d’énergie, amenée à se développer de manière exponentielle au cours des prochaines décennies. Le potentiel de l’éolien en mer est ainsi largement supérieur à celui du terrestre. Un rapport de l’Agence International de l’Energie (IEA) de 2019 évalue celui-ci à quelque 420 000 TWh par an, soit… 18 fois la demande mondiale en électricité. En Europe, le leader en la matière, le potentiel de l’offshore dépasse les 33 000 TWh, alors même que la demande en électrique est inférieure à 3 000 TWh.

Et le potentiel énergétique de l’océan est loin de se limiter à l’éolien. Nombre de technologies sont actuellement en cours de développement pour créer de l’électricité durable en utilisant les différentes dimensions de l’océan (vagues, marées, courants, salinité, etc.). Turbines hydrauliques, barrages, installations houlomotrices, usines marémotrices : autant de solutions extrêmement prometteuses.

Parce qu’ils en sont les premières victimes, mais également des porteurs de solutions face au réchauffement climatique, les océans se révèlent assurément, plus que jamais, au cœur du défi environnemental.

1. https://www.europarl.europa.eu
2. https://www.agenda-2030.fr
4. https://www.especes-menacees.fr/le-saviez-vous/oceans-produisent-plus-oxygene-que-forets/
5. https://link.springer.com/article/10.1007/s11538-015-0126-0
6. https://www.ncdc.noaa.gov/cag/global/time-series/globe/ocean/ytd/12/1880-2021
7. https://www.science.org/doi/10.1126/science.aam7240
8. https://www.novethic.fr
9. https://www.lesechos.fr
10. https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/climat-la-banquise-a-perdu-96-de-sa-surface-en-35-ans_3620835.html
11. https://www.ipcc.ch
12. https://www.oecd.org/publications/the-ocean-economy-in-2030-9789264251724-en.html
13. https://www.francetvinfo.fr
14. https://www.oecd.org/publications/the-ocean-economy-in-2030-9789264251724-en.html

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