Défis environnementaux

10 ans après l’accord de Paris, quels sont les enjeux de la COP 30 ?

La COP 30 se tiendra à Belém du 10 au 21 novembre 2025, 10 ans après l’accord de Paris et l’engagement collectif de limiter le réchauffement climatique bien en-dessous des +2°C par rapport aux niveaux préindustriels.

Publié le 20 octobre 2025

COP30

Juliette Cohen 
Stratégiste Senior - CPRAM

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Après une COP 29 jugée décevante et une demande pressante de réforme du processus de fonctionnement des discussions climatiques, devenues de plus en plus complexes, la COP 30 veut être celle de l’action. Le secrétaire exécutif de la CCNUC (Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques), Simon Stiell, espère qu’elle sera l’occasion d’aller « plus loin, plus vite, de façon plus juste ». Pour sa part, le Brésil souhaite que la COP30 soit celle de « l’implémentation » après plusieurs COP des engagements. Le défi est particulièrement important alors que la température mondiale a dépassé, en 2024 et pour la première fois, de 1,5°C celle de l’ère préindustrielle et que le Président Trump a annoncé la sortie des Etats-Unis de l’accord de Paris dès son arrivée à la Maison Blanche. Cette dernière deviendra effective en janvier 2026. 

COP30

Les principaux enjeux de cette nouvelle COP après les négociations intermédiaires qui ont eu lieu en juin à Bonn

  • La réforme du processus de décision pour gagner en efficacité 

Plus de 200 ONG et représentants de la société civile ont demandé une réforme du processus de décision jugé trop lourd et complexe. Plusieurs propositions ont été émises : limiter les délégations nationales à 200 membres, passer à une prise de décision majoritaire, fixer des agendas plus stricts …. 

  • La mise à jour des contributions climatiques nationales (NDC)

C’est-à-dire des engagements climatiques des états. L’année 2025 est la date limite pour la soumission des engagements à horizon 2035, appelés NDC 3.0. Ces contributions doivent s’appuyer sur les résultats du premier bilan mondial, le Global Stocktake, réalisé en 2023, et qui estimait que les températures mondiales allaient augmenter de l’ordre de 2,1 à 2,8°C si l’ensemble des NDC étaient mises en œuvre. Il relevait pourtant que 87% de l’économie mondiale avait un objectif de neutralité climatique.  Au 2 octobre 2025, seulement 62 des 194 NDC attendues avaient été soumises. 

  • La question globale des financements climatiques (« climate finance ») avec plusieurs dimensions 

A la COP 29 de Bakou, les pays développés ont convenu d’augmenter leurs financements climatiques à destination des pays en développement afin d’atteindre 300 Mds $ par an en 2035, ce qui constitue le « nouvel objectif collectif qualifié » actuel (NCQG, New Collective Quantified Goal). Cependant, les pays en développement évaluaient leurs besoins de financements annuels pour le climat à 1300 Mds $. Le gap est d’autant plus important, qu’entre temps, les Etats-Unis, qui étaient le principal contributeur au financement climatique, ont annulé toutes leurs aides liées au climat et que plusieurs pays européens ont annoncé qu’ils allaient réduire leurs financements de l’aide au développement. Or, de nombreux pays du Sud lient l'ambition de leurs NDC à un soutien financier du Nord.

D’autres points de négociation portent sur les sources de financement (dons publics, prêts publics, investissement privé, taxes ciblées...) et la répartition des fonds entre atténuation, adaptation et pertes et dommages. Les engagements pour les pertes et dommages subis par les pays en développement restent aujourd’hui très faibles, c’est-à-dire de moins de 800 millions $, dont moins de la moitié ont été réellement versés.

L’Azerbaïdjan et le Brésil ont été mandatés pour élaborer une « Feuille de route Bakou-Belém » pour avancer sur les sujets liés au financement et aboutir à une feuille de route fin octobre 2025 en amont de la COP 30.

  • Les objectifs d’une transition juste

Ces objectifs qui doivent être intégrés dans les NDC, seront également au cœur des discussions à Belém. Les pays en développement sont particulièrement sensibles aux impacts humains de la transition : travail décent, respects des droits des communautés, inégalités, accès à l’énergie... La conférence de Bonn de juin 2025 a déjà publié une note informelle qui servira de base aux discussions de la COP30.

  • L’objectif mondial d’adaptation au changement climatique (GGA : Global Goal on Adaptation)

En 2023, les parties ont convenu d’un cadre général pour l’adaptation au changement climatique notamment dans les domaines définis comme prioritaires que sont l’alimentation, l’eau et la santé. Elles ont lancé le travail sur la définition « d’indicateurs » d’adaptation puisqu’il n’existe à aujourd’hui aucun indicateur concret et mesurable permettant de suivre les efforts des pays pour s’adapter au changement climatique. La conférence de Bonn a abouti à une liste de 490 indicateurs potentiels mais l’objectif est d’aboutir à une liste d’une centaine d’indicateurs, certains globaux et d’autres spécifiques à certaines régions. 

  • La question du financement de l’adaptation

Ce point qui désigne le soutien financier des pays développés aux mesures d’adaptation dans les pays en développement, sera également au cœur des négociations. Lors de la COP26 de 2021 à Glasgow, les pays s'étaient fixés comme objectif de doubler le financement climatique destiné à l'adaptation entre 2019 et 2025. Un rapport du Programme des Nations Unies pour l'environnement de 2024 a constaté que les flux financiers publics destinés à l'adaptation aux changements climatiques vers les pays en développement avaient fortement augmenté entre 2021 et 2022 passant de 22 à 28 Mds $. Cependant, même si cette tendance se poursuivait, cela ne couvrirait qu'environ 5 % des besoins financiers en matière d'adaptation. 

  • Les engagements de sortie des combustibles fossiles 

Après l’obtention d’une déclaration d’intention à la COP 28, « transition away from fossil fuels », il s’agit d’obtenir des objectifs plus clairs et précis de sortie du charbon et du pétrole.

  • La protection des forêts et le lancement officiel d’un fonds spécial TFFF (Facilité de Financement des Forêts Tropicales)

Ce fonds d’investissement regroupant des participations publiques et privées a vocation à investir dans des obligations d’Etats et à en verser les revenus aux pays à forte couverture forestière qui fourniraient des efforts pour lutter contre la déforestation et s’engager dans la préservation de leurs forêts.


Comme nous allons le voir, la façon qu’ont les grandes puissances (Chine, Etats-Unis, Union européenne) d’envisager la COP 30 est très différente. 

L'Union européenne, divisée, n'a pas finalisé à temps sa nouvelle NDC 

En septembre, les ministres européens de l'Environnement ont adopté une déclaration d’intention sur une réduction des émissions de gaz à effet de serre de -66,25% à -72,5% à l'horizon 2035 par rapport aux niveaux de 1990. Celle-ci doit être affinée dans les semaines ou mois qui viennent. Au printemps 2025, la Commission européenne avait proposé de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 90% à l’horizon 2040, par rapport à 1990, afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050 mais plusieurs pays ont demandé récemment de rediscuter de cet objectif au sommet européen qui se tiendra fin octobre. Cela a bloqué l’adoption de l’objectif 2035 et conduit à un retard dans la publication de la nouvelle NDC européenne. 

La Chine s'est engagée sur des objectifs chiffrés pour la 1ère fois

La Chine a annoncé qu’elle abaisserait ses émissions de 7 à 10% d’ici 2035 par rapport à leur pic. C’est la première fois que la Chine annonce un objectif chiffré de réduction de ses émissions. Même si certains observateurs ont jugé cette annonce trop timide, elle est à saluer malgré tout, étant donné le désengagement américain sur la question climatique. 

Certaines analyses indiquent que le pic d’émissions de la Chine aurait été atteint en 2024 alors que sa précédente NDC ambitionnait simplement un pic avant 2030. Si la trajectoire d’émissions de la Chine est aussi importante, c’est qu’elle est de très loin le plus gros émetteur de gaz à effet de serre du monde (avec des émissions 5 fois plus élevées que l’Union européenne et 2,6 fois plus élevées que les Etats-Unis) et qu’une simple réduction de 10% équivaudrait aux émissions agrégées des 120 pays du monde qui émettent le moins. De plus, les investissements de plus en plus importants dans les énergies et les technologies propres dans ce pays peuvent avoir un effet d’entraînement pour le reste du monde, bénéfique pour la lutte contre le changement climatique. 

Les Etats-Unis potentiellement absents des négociations

L’administration Biden avait fixé pour les Etats-Unis, un objectif ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de 61 à 66% en 2035 par rapport au niveau de 2005. Le revirement à 180° de l’administration Trump sur la politique énergétique, annulant les aides à la transition énergétique et favorisant la production d’énergies fossiles, rend cet objectif totalement irréaliste.  

En avril 2025, Marco Rubio a supprimé le Bureau du changement global, qui représentait les États-Unis dans les négociations internationales sur le changement climatique. Les Etats-Unis se sont tenus éloignés des négociations intermédiaires de Bonn et n’ont pas confirmé s’ils enverraient une délégation officielle à Belém ou pas. 

Les organisateurs craignent que l’absence des Etats-Unis ne conduise à des engagements moins ambitieux de la part de la communauté internationale et notamment de la Chine. Les États-Unis ont régulièrement incité la Chine à prendre des engagements plus ambitieux sur le climat et leur coopération en matière de lutte contre le changement climatique a perduré au travers de plusieurs administrations américaines. En 2021, les deux pays avaient conclu un accord important, s'engageant à développer les énergies renouvelables et à limiter les émissions de gaz à effet de serre. 

COP30

Les défis de la COP 30 sont nombreux et tiennent aussi bien aux objectifs climatiques eux-mêmes, qu’au financement climat ou au mode de fonctionnement des négociations internationales sur le sujet. En effet, le Global Stocktake met en exergue l’écart entre les politiques actuellement mises en œuvre et les objectifs climatiques pris à Paris. La fenêtre permettant d’ajuster les politiques climatiques pour rester dans les objectifs est près de se refermer et nécessite des actions rapides. Alors que les Etats-Unis se désengagent du sujet, que l’Europe est plus divisée sur les prochaines étapes, la Chine et ses engagements apparaissent comme des avancées précieuses. 

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